BJN#107 – Pour l’instant la dépression et l’anxiété ne se dialysent pas… let’s meditate

Brief Mindfulness Meditation for Depression and Anxiety Symptoms in Patients Undergoing Hemodialysis: A Pilot Feasibility Study

Merci à Aldjia Hocine, Néphrologue à Paris et membre du conseil scientifique du CJN, pour cette synthèse bibliographique. Vous aussi, n’hésitez pas à nous envoyer vos lectures !

Introduction :

L’anxiété et la dépression touchent plus de 50% des patients hémodialysés. Elles sont associées à une moins bonne qualité de vie et une morbi-mortalité accrue. Ces troubles ne sont pas pris en charge de manière optimale pour différentes raisons : manque de dépistage, d’outils validés, effectif réduit de psychologues et options pharmacologiques limitées.

La méditation pleine conscience est un entrainement de l’attention. Elle a démontré son efficacité en psychiatrie mais aussi dans la prise en charge de différentes pathologies chroniques, particulièrement en oncologie avec le développement des soins de support. Très peu de données sont disponibles pour les patients en dialyse.

L’objectif primaire de cette étude est d’évaluer sur période de 8 semaines la faisabilité d’une session de méditation de 10 à 15 minutes 3 fois par semaine. Les critères de faisabilité étant : le recrutement des patients, un nombre minimum de séances complètes et la tolérance de la séance par les patients.

L’objectif secondaire est d’évaluer si la méditation diminue objectivement les symptômes selon les échelles d’évaluation choisies.

Patients/matériels et méthodes

L’étude est un essai contrôlé, randomisé, mené entre mars et juillet 2016, dans une unité de dialyse type « centre lourd » d’un hôpital canadien à Montréal.

Les critères d’inclusions étaient: > 18 ans, parlant français ou anglais, score ≥ 6 sur l’une et/ou l’autre des échelles standardisées et validées des symptômes anxieux et/ou dépressifs : Patient Health Questionnaire (PHQ-9), General Anxiety Disorder (GAD-7). Les critères d’exclusions étaient : des troubles cognitifs avérés, une psychose chronique, ou des idéations suicidaires.

Les séances de méditation ont été menées par un psychologue clinicien et un résident en psychiatrie. Chaque session durait 10 à 15 minutes, se déroulait en entretien privé pendant la séance dans un espace rendu le plus confidentiel possible.

Résultats

Sur les 41 patients randomisés, 21 patients était dans le groupe interventionnel et 20 dans le groupe contrôle. L’âge moyen des participants était de 65 ans, 34% de femmes, 50% vivaient en famille. Il s’agissait d’une population en dialyse depuis en moyenne 4 ans, avec de nombreuses comorbidités dont : hypertension (85%), diabète (63%), coronaropathies (44%). 46 % des patients étaient sous psychotropes au moment de l’inclusion.

82% des sessions ont pu avoir lieu avec 71% des patients qui ont terminé le suivi dans le groupe interventionnel. 55% des sessions manquées l’étaient pour des raisons logistiques (changement d’heure, de jour de roulement), et 45% liées à l’état du patient (refus, fatigue, pathologie intercurrente).

La plupart des patients ont apprécié la méditation avec un score médian de 8 sur 10 sur l’échelle de Likert avec des retours subjectifs très positifs: plus de courage, d’espoir, et de confiance en soi voire une réduction de la fatigue post-dialyse.

En revanche, pas de différence dans les échelles d’évaluation de symptômes.

Conclusion

Premier essai contrôlé randomisé qui montre que des séances de méditation pleine conscience peuvent s’organiser au sein d’un centre lourd d’hémodialyse avec un bénéfice subjectif évident pour les patients.

Les plus du papier

Inclusion de patients avec de lourdes comorbidités souvent exclus de la plupart des études.

Evaluation d’une thérapeutique non pharmacologique

Soins organisés pendant la dialyse  qui évite des rendez-vous supplémentaires hors séance

Cet article souligne la nécessité de mettre en place des équipes pluridisciplinaires pour mieux prendre en charge les troubles anxio-dépressifs en dialyse. De manière plus large il met en lumière la nécessité pour les soignants d’être moteurs dans le développement des soins de supports dédiés aux patients insuffisants rénaux chroniques.

Les critiques

Manque de puissance pour démontrer l’efficacité de la méditation pleine conscience sur la diminution des symptômes (faible effectif)

28 octobre 2018
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