BJN#230 – La corticothérapie : l’utile du Berger ?

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BJN#230 – La corticothérapie : l’utile du Berger ?

Merci à Amaury DUJARDIN, de LAVAL, membre du conseil scientifique pour ce résumé.

N’hésitez pas, si vous le souhaitez, à nous envoyer vos lectures !

Cette BJN est rédigée en rapport avec cet article :

Effect of Oral Methylprednisolone on Decline in Kidney Function or Kidney Failure in Patients With IgA Nephropathy, publié par Jicheng Lv et al. dans le JAMA en Mai 2022.

 

Introduction

La néphropathie à IgA est une glomérulopathie fréquente et potentiellement sévère. Pourtant, aucun traitement spécifique n’a pour le moment été mis au point, même s’il existe de nombreux arguments en faveur d’un traitement immunomodulateur. Les corticoïdes sont débattus dans cette indication, en raison d’un bénéfice supposé mais d’une toxicité importante. Les auteurs de cette étude ont étudié l’efficacité et la tolérance de cette classe thérapeutique, contre placebo, chez des patients ayant une néphropathie à IgA protéinurique.

Matériels et méthodes

Il s’agissait d’un essai multicentrique, randomisé, contre placebo et en double aveugle. Le protocole a été suspendu puis modifié après les 262 premières inclusions devant un surrisque d’infections sévères dans le groupe « corticothérapie », avec des doses réduites de corticothérapie (0.4 mg/kg contre 0.8mg/kg initialement, dans les deux cas pour une durée totale de 6-9 mois). Les patients étaient inclus après preuve histologique d’une néphropathie à IgA, si leur clairance CKD-EPI était > 20 mL/min/1.73m² et s’ils avaient une protéinurie > 1g /24h sous bloqueur du SRAA. Les critères d’exclusion comprenaient une contre-indication ou une indication formelle aux corticoïdes, et l’utilisation d’un traitement immunosuppresseur au cours de l’année précédente. Le critère de jugement composite comprenait un déclin >40 % de la fonction rénale, une nécessité d’épuration extra-rénale et un décès de cause néphrologique. Les effets secondaires de la corticothérapie (notamment infections sévères, diabète, hémorragie digestive, fracture ou ostéonécrose, et évènements cardiovasculaires) étaient recueillis.

Résultats

503 patients, en moyenne âgés de 38 ans, ont été inclus (262 dans le protocole originel et 241 dans le protocole « dose réduite »). Le DFG moyen était de 61.5 mL/min/1.73m² et la protéinurie moyenne de 2.46 g/24h. Le critère de jugement était moins souvent atteint chez les patients du groupe « corticothérapie » (28.8 % contre 43.1 % dans le groupe placebo, HR=0.53 [IC95 % 0.39-0.72]) ; l’effet était maintenu dans le groupe ayant reçu la corticothérapie à plus faible dose. La pente de DFG était de -2.5 mL/min/1.73m² dans le groupe « corticothérapie », contre -4.97 mL/min/1.73m² dans le groupe placebo. Les patients du groupe « corticothérapie » rapportaient plus d’effets secondaires sévères (28 patients soit 10,9 %, dont 4 fatals, contre 7 soit 2.8 % et aucun décès dans le groupe placebo).

Conclusion

Un traitement prolongé par corticoïdes dans la néphropathie à IgA protéinurique semble permettre une amélioration du pronostic rénal. Cependant, ce traitement est à risque important d’effets indésirables sévères pouvant conduire au décès du patient.

 

Les plus du papier

– Etude à grande échelle sur une question fréquemment posée en pratique courante.

– Etude avec un design de bonne qualité.

– Cette étude peut inciter à utiliser la corticothérapie chez ce profil de patient, à l’échelle individuelle et après évaluation du risque d’effets indésirables.

Les critiques

– Le protocole a été modifié en cours d’étude, les auteurs concluent donc un peu vite que l’usage des corticoïdes à dose réduite pourrait entrainer moins d’effets indésirables pour un même bénéfice rénal.

– Population principalement d’origine chinoise (75%) : extrapolabilité des données ?

– Plusieurs autres études montrent des résultats divergents sur l’efficacité de la corticothérapie (STOP-IgAN).

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