BJN#133 – La pré-éclampsie expose à un risque de maladie rénale chronique à long terme

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BJN#133 – La pré-éclampsie expose à un risque de maladie rénale chronique à long terme

Pre-eclampsia and risk of later kidney disease: nationwide cohort study

Merci à Aurélien Lorthioir, Néphrologue à Paris et membre du comité scientifique du CJN, pour cette synthèse bibliographique. Vous aussi, n’hésitez pas à nous envoyer vos lectures !

Introduction

La pré-éclampsie (PE) est une complication de la grossesse définie par l’apparition d’une hypertension (HTA) et d’une protéinurie après 20 semaines d’aménorrhée (SA). La PE peut se compliquer d’insuffisance rénale aiguë. La répercussion de la PE sur les reins à long terme est moins claire. Certaines études épidémiologiques ont mis en évidence une association forte entre PE et risque d’insuffisance rénale (IR) terminale tandis que d’autres études n’ont pas mis en évidence de lien entre PE et risque d’IR chronique (IRC) ou d’albuminurie. Ces différences peuvent s’expliquer par des différences dans la taille des échantillons, la durée de suivi, les définitions employées, l’ancienneté de la PE. Cette nouvelle étude évalue l’association entre PE et risque d’IRC.

 

Patients/matériels et méthodes

Ce travail a recensé toutes les femmes ayant eu au moins une grossesse dépassant 20 SA au Danemark entre Janvier 1978 et Octobre 2015 en utilisant des bases de données médicales (Medical Birth Register et National Patient Register). Les patientes qui avaient des maladies rénales, de l’HTA, des maladies cardiovasculaires ou auto-immunes avant la grossesse étaient exclues. Les patientes ayant eu un diagnostic de maladie rénale entre 20 SA et 3 mois post-partum étaient exclues. Le critère principal de jugement était le hazard ratio (HR) des maladies rénales entre femmes avec et sans pré-éclampsie, stratifié par l’âge gestationnel à l’accouchement.

 

Résultats

La cohorte est constituée de 1 072 330 femmes qui ont été suivies pendant en moyenne 18,6 ans, soit une cohorte de 19 994 470 personnes-années. Comparées aux femmes sans antécédent de PE, les femmes qui ont un antécédent de PE étaient plus à risque de développer une maladie rénale : HR de 3.93 (IC 95% 2.90 à 5.33) en cas de PE et d’accouchement avant 34 SA, HR de 2.81 (IC 95% 2.13 à 3.71) en cas de PE avec accouchement entre 34 et 36 SA, HR de 2.27 (IC 95% 2.02 à 2.55) en cas de PE avec accouchement ≥ 37 SA. Les associations les plus fortes étaient trouvées pour les maladies rénales chroniques, les néphropathies hypertensives et les néphropathies glomérulaires et protéinuriques. L’association était atténuée après ajustement pour les maladies cardiovasculaires et l’HTA mais restait significativement différente entre les 2 groupes (cf. tableau). L’association était plus forte dans les 5 ans qui suivaient la PE qu’au-delà des 5 ans (cf. figure).

 

Conclusion

Cette étude suggère que la PE, en particulier avant 34 SA, est fortement associée aux maladies rénales chroniques ultérieures. Les femmes ayant fait une PE devraient bénéficier d’une surveillance rénale dans les années qui suivent une PE. Le diagnostic précoce d’anomalies rénales pourrait permettre une prise en charge adaptée afin de ralentir la progression de la maladie.

 

Les plus du papier

– Cohorte nationale donc totalement représentative de la population du Danemark avec biais faibles

– Inclusion sur une très longue durée (38 ans)

 

Les critiques

– Manque de précisions sur les diagnostics étiologiques de maladie rénale (problème des registres)

– D’autres variables potentiellement confondantes (comme l’indice de masse corporelle) n’ont pas pu être évaluées par les auteurs (données manquantes)

– Cohorte Danoise : constituée principalement de femme blanches européennes donc résultats qui mériteraient d’être confirmés dans d’autres cohortes

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