BJN#243 – La finerenone, c’est ma came… AMBER

archives/22726

BJN#243 – La finerenone, c’est ma came… AMBER

Merci à Pierre Filipozzi, de Metz, membre du conseil scientifique pour ce résumé.

N’hésitez pas, si vous le souhaitez, à nous envoyer vos lectures !

Cette BJN est rédigée en rapport avec cet article :

A comparative post hoc analysis of finerenone and spironolactone in resistant hypertension in moderate-to-advanced chronic kidney disease, publié par Agarwal et al. en Février 2023 dans le Clinical Kidney Journal

 

Introduction

La finerenone, un antialdostérone non stéroïdien, a démontré une efficacité sur la prévention des événements cardiovasculaires et la progression de la maladie rénale chronique dans les essais FIDELIO-DKD (Bakris GL. NEJM. 2020) , FIGARO-DKD (Pitt B. NEJM. 2021) et l’analyse poolée de ces deux essais : FIDELITY (Agarwal R. European Heart Journal 2022). Les KDIGO 2021 sur la prise en charge de l’HTA dans la MRC n’ont pas recommandé d’utiliser la finerenone dans HTA résistante du fait d’un effet antihypertenseur modeste ( -2-3mmHg dans FIDELIO-DKD) et du risque d’hyperkaliémie. Les auteurs du présent travail ont voulu évaluer l’efficacité sur la TA et la tolérance de la finerenone chez des patients d’un sous groupe de FIDELITY avec une HTA résistante et une maladie rénale modérément avancée.

 

Matériels et méthodes

Les patients de FIDELITY étaient diabètiques de type 2 avec un ratio urinaire albumine/créatinine ≥ 30mg/g et un bloqueur du SRAA à la dose maximale tolérée. Un sous-groupe de patients de FIDELITY (nommé FIDELITY-TRH) répondant aux critères d’inclusion de l’étude AMBER a été selectionné : DFG entre 25 et 45mL/min/1,73², kaliémie à l’inclusion entre 4,3 et 5,1mmol/L, TA entre 135 et 160mmHg, prise de 3 antihypertenseurs ou plus dont un diurétique, absence de supplémentation en potassum ou de prise d’AINS. AMBER était une étude de phase II randomisée qui visait à déterminer si le patiromer permettait un usage plus prolongé de la spironolactone chez des patients IRC diabétiques avec une HTA résistante. Tous les patients d’AMBER avaient donc de la spironolactone.  Les données des patients de FIDELITY-TRH ont ensuite été comparés aux données des patients de AMBER.

Les mesures de TA (mesurées en cabinet), le ratio UAC, les effets indésirables, l’incidence des hyperkaliémies ≥ 5.5 mmol/L et des hyperkaliémies conduisant à l’interruption du traitement ont été relevées à 120j (env 17S) du début du traitement dans le groupe FIDELITY-TRH et comparées aux données issues d’AMBER à 12S du début de l’étude (point de suivi le plus proche entre les deux travaux)

 

Résultats

624 patients sur les 13026 patients de FIDELITY ont été inclus dans ce travail.Les patients du groupe FIDELITY-TRH étaient sensiblement différents des patients de l’étude AMBER pour l’albuminurie, la fréquence du diabète, l’origine ethnique, la fréquence de l’insuffisance cardiaque (cf tableau ).

La TA systolique a plus diminué dans le groupe finerenone que dans le groupe placebo [-7,1mmHg (IC95 5,6-8,6) vs -1,3mmHg (IC95 0,4-3,0) ; p< 0,0001]. Chez les patients de AMBER, la différence n’était pas significative entre le groupe patiromer et le groupe placebo [-11,7mmHg (IC95 -14,1 à -9,3mmHg) vs -10,8mmHg (IC95 -13,2 à -8,3mmHg) , p=0,58]. La diminution de l’albuminurie était plus marquée dans le groupe finerenone vs le groupe placebo de 229.8mg/g (IC95 −353,5 à −106,1 ; p=0,0082) et non significative entre le groupe patiromer et placebo.

L’incidence cumulée des hyperkaliémies ≥ 5,5mmol/L dans FIDELITY-TRH était de 12% dans le groupe finerenone et de 3% dans le groupe placebo. Dans AMBER, elle était de 35% chez les patients traités par patiromer et de 64% chez les patients traités par placebo. L’hyperkaliémie a conduit a arrêter le traitement dans FIDELITY-TRH chez 1 patient sur 316 (0,3%) sous finerenone et chez aucun patient sous placebo. Dans AMBER, 7% (10/147) des patients sous patiromer et 23% (34/148) des patients sous placebo ont du arrêter la spironolactone pour une hyperkaliémie. La proportion de patients dans FIDELITY-TRH avec une diminution du DFG ≥30% était de 7% (22/314) pour le groupe finerenone  et de 7% (20/304) pour le groupe placebo contre respectivement 19% (28/147) et 18% (26/148) chez les patients d’AMBER avec patiromer et placebo.

Conclusion

Par comparaison à des patients sous spironolactone avec ou sans patiromer, les patients traités par finerenone avaient une moindre réduction tensionnelle, une incidence moindre de l’hyperkaliémie et un risque moindre d’altération de la fonction rénale. Le risque d’interruption du traitement pour hyperkaliémie semblait faible sous finerenone.

 

Les plus du papier

Ce travail illustre certaines particularités de la finerenone par rapport à la spironolactone. Il semble indiquer que la finerenone serait plus simple d’utilisation chez les patients avec une MRC avancée.

L’étude semble confirmer que la finerenone a un effet antihypertenseur moindre que l’aldostérone. La finerenone pourrait toutefois aider au contrôle tensionnel chez les patients MRC avec une HTA résistante.

 

Les critiques

Il s’agit d’une comparaison indirecte entre deux groupes de patients issus d’études différentes. Les populations ne sont pas comparables avec des différences importantes sur le niveau de l’albuminurie et la fréquence du diabète. Le niveau de preuve est donc limité et ce travail n’est qu’indicatif.

Le nombre de patients du groupe FIDELITY-TRH est faible en comparaison avec les 13026 patients de FIDELITY. Cela pose la question de l’extrapolation des résultats.

Les arrêts de traitements chez les patients sous spironolactone peuvent avoir été influencés par le caractère ouvert de l’étude AMBER et les contrôles plus fréquents de kaliémie prévus dans ce protocole. La fréquence des effets indésirables graves était plus importante chez les patients FIDELITY-TRH mais les auteurs ne donnent pas de détail.

Au delà de ce travail, plusieurs questions restent en suspens concernant la finerenone. Quelle doit être la place de la finerenone dans l’arsenal thérapeutique maintenant que nous disposons des iSGLT-2 ? Pourra-t-on espérer un effet protecteur de la finerenone chez les patients non diabétiques ? Les études CONFIDENCE (résultats attendus en 2025) et FIND-CKD (résultats attendus en 2026) devraient permettre d’avoir la réponse à ces deux questions.

Partager cet article


CJN - Jeunes Néphrologues

GRATUIT
VOIR