BJN#146 – Effet d’un nouvel antagoniste des récepteurs aux minéralocorticoides, l’esaxerenone, dans la néphropathie diabétique.

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BJN#146 – Effet d’un nouvel antagoniste des récepteurs aux minéralocorticoides, l’esaxerenone, dans la néphropathie diabétique.

Efficacy and Safety of Esaxerenone (CS-3150) for the Treatment of Type 2 Diabetes with Microalbuminuria A Randomized, Double-Blind, Placebo-Controlled, Phase II Trial

Merci à Jean-Philippe Hammelin, Néphrologue à Douai et contributeur à la BJN, pour cette synthèse bibliographique. Vous aussi, n’hésitez pas à nous envoyer vos lectures !

Au cours des MRC, notamment la néphropathie diabétique, l’albuminurie constitue un marqueur de risque CV et un facteur de progression de la MRC.

Beaucoup de patients, malgré un blocage du SRA (IEC ou ARA2) à posologie maximale, restent albuminuriques.

L’une des possibilités est alors d’associer un antagoniste des récepteurs aux minéralocorticoïdes (RM) à l’IEC ou l’ARA2, ce d’autant que l’activation excessive du RM est associée à une insulinorésistance et favorise la fibrose néphronique. La problématique est que ce « duo » augmente considérablement le risque d’hyperkaliémie.

Dans cet article, les auteurs publient les résultats d’un essai multicentrique randomisé, en double-aveugle, étudiant l’esaxerenone, un nouvel antagoniste non-stéroïdien du RM, à différentes posologies VS placebo, incluant des patients adultes, majoritairement hypertendus (95%), diabétiques de type 2, traités par ARA2 ou IEC à dose maximale depuis au moins 3 mois, avec une albuminurie comprise entre 45 et 300 mg/g, et un DFGe ³ 30 ml/min/1.73m².

Les autres types de diabète, les diabètes mal équilibrés (HbA1c ³8.4%), les néphropathies non-diabétiques, les hypotendus ou hypertendus sévères (³160/110 mmHg), hypo ou hyperkaliémiques d’emblée, ne sont pas inclus.

Les participants sont exclus de l’étude en cas d’apparition d’une hyperkaliémie (1 fois ³ 6, ou 2 fois successivement ³ 5.5 mmol/l), de dégradation de la fonction rénale (définie par une élévation créatininémie ³50% base sur 2 prélèvements successifs), ou en cas d’hypotension <90/50 ou d’HTA ³ 180/110 mmHg.

90% des patients ont complété l’étude jusqu’au bout.

Le critère de jugement principal est la variation du rapport albumine/créatinine urinaires.

L’étude a porté sur 358 patients, majoritairement des hommes, avec une MRC plutôt précoce (stades 1 et 2 : 2/3, stades 3 : 1/3 des patients). Les caractéristiques des patients sont détaillées ci-dessous. Les 5 groupes sont homogènes.

Les patients sous esaxerenone voient significativement leur albuminurie diminuer par rapport au placebo, et de façon dose-dépendante (baisse du rapport albuminurie/créatininurie de 21 à 56%, VS 7% dans le groupe placebo). Le % de patients qui « négativent » leur albuminurie, est significativement supérieur (21%) VS placebo (3%) dans les groupes 2.5 et 5 mg d’esaxerenone.

Il n’y a pas d’interaction statistiquement significative entre la baisse de l’albuminurie et : le BMI, la PA systolique, le DFGe, et les autres antihypertenseurs associés, suggérant un effet propre de l’esaxerenone.

Concernant les effets indésirables tous confondus, on voit qu’il n’y a pas de différence entre les groupes, et que ceux-ci sont mineurs. L’hyperkaliémie est dose-dépendante, et responsable d’une sortie de l’étude chez seulement 10% des patients traités 5 mg d’esaxerenone, et 3% des patients dans chaque groupe de posologie inférieure. Les signes d’hypotensions orthostatiques et la dégradation de la fonction rénale ne sont rencontrés que dans le groupe 5 mg. Tous ces effets-indésirables régressent à l’arrêt du traitement. Aucun effet indésirable « hormonal », comme la gynécomastie, n’a été rapporté.

Cette étude montre que l’ajout d’esaxerenone à un IEC/ARA2 à dose maximale permet de réduire ostensiblement et significativement l’albuminurie des patients diabétiques protéinuriques, sans risque majeur d’hyperkaliémie notamment.

Les résultats sont comparables à ceux obtenus avec un autre nouvel antagoniste du RM, publiés précédemment : la finerenone [1].

La dose de 2.5 mg d’esaxerenone semble constituer un bon compromis entre les risques et les bénéfices. D’autres études plus longues, sur des populations plus importantes, et sur des critères de morbi-mortalité sont nécessaires pour confirmer l’intérêt de cette nouvelle molécule.

Points négatifs : durée courte, donc critère de jugement sur données biologiques et non sur la morbi-mortalité. Population « non occidentale » : exclusivement japonaise, non obèse. Patients les plus graves exclus (MRC stade >3, HTA sévère, diabète mal équilibré). Financement de l’étude non-indépendant.

Point positifs : étude bien menée, qui s’attaque à une problématique courante, contrôle de l’observance par dosage de l’esaxerenone.

[1] : Bakris GL. Et al, Effect of Finerenone on Albuminuria in Patients With Diabetic Nephropathy: A Randomized Clinical Trial. Mineralocorticoid Receptor Antagonist Tolerability Study–Diabetic Nephropathy (ARTS-DN) Study Group. JAMA. 2015 Sep 1;314(9):884-94.

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