BJN#60 L’osmolarité urinaire comme marqueur pronostique et de suivi dans la PKRAD, tout est une question de concentration

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BJN#60 L’osmolarité urinaire comme marqueur pronostique et de suivi dans la PKRAD, tout est une question de concentration

Urine Osmolality, Response to Tolvaptan, and Outcome in Autosomal Dominant Polycystic Kidney Disease: Results from the TEMPO 3:4 Trial

La polykystose rénale autosomique dominante (PKRAD) est due à une mutation des polycystines 1 ou 2 (canaux calciques) situées dans les cils et à la face latérale de l’epithélium tubulaire. Il en résulte une augmentation de la production d’AMPc intracellulaire, ce qui conduit à la prolifération cellulaire et à la sécrétion de fluide qui concourent à la formation de kystes.

La Vasopressine est un inducteur majeur de la production d’AMPc via son récepteur V2R dans le tubule distal

Le Tolvaptan est une molécule aquarétique, antagoniste des récepteurs V2 à la Vasopressine. Il
diminue la sécrétion du fluide et de la prolifération cellulaire.

L’inhibition de V2R entraine une inhibition de la maladie kystique et une stabilisation voire une amélioration de la maladie existante (modèles murins).

L’étude TEMPO 3:4 est un large essai contrôlé randomisé en double aveugle contre placebo, multicentrique. Il a montré une diminution significative de la croissance kystique et de la douleur, ainsi que le ralentissement du déclin de la fonction rénale  après un traitement par Tolvaptan (Torres VE, NEJM 2012).

La prolifération kystique est lente : le déclin de la fonction rénale se fait vers la 3ème ou 4ème décade. Mais la progression se fait souvent vers l’IRCT

Par contre, la capacité à concentrer les urines est altérée précocément. L’osmolarité urinaire serait un marqueur précoce et non invasif de la maladie.

Les objectifs étaient à partir de la cohorte de TEMPO :

  • D’identifier les déterminants de l’osmolarité urinaire chez les polykystiques
  • De déterminer si l’osmolarité urinaire peut être un facteur pronostique de sévérité dans la PKRAD
  • D’identifier les facteurs influençant la réponse au Tolvaptan
  • De déterminer les événements cliniques associés aux variations l’osmolarité urinaire

Patients/matériels et méthodes

  • Sous analyse post-hoc de l’essai TEMPO 3:4 (essai de phase 3 multicentrique, randomisé en double aveugle)
  • Critères d’inclusion : Patients polykystiques entre 18 et 50 ans avec un volume rénal total > 750 ml en IRM et une Clairance > 60 mL/min
  • 1445 patients randomisés en ratio 2:1 : 961 Tolvaptan / 484 placebo. Pendant 3 ans.
  • Phase de titration du Tolvaptan les 3 premières semaines jusqu’à dose maximale tolérable (soif, polyuro-polydipsie), jusqu’à 90-30 mg. Les diurétiques étaient évités et les patients encouragés à boire.
  • Seuls les patients ayant indiqués que l’osmolarité urinaire à la randomisation était à jeun ont été inclus
  • Critère de jugement composite : dégradation clinique :
    dégradation de la fonction rénale, douleur significative nécessitant un traitement voire une intervention chirurgicale, aggravation de l’HTA, aggravation de l’albuminurie

 

Résultats

  • A la baseline : l’osmolarité urinaire est corrélée négativement à l’âge et au volume rénal et positivement au DFG
  • L’osmolarité urinaire influencée par : l’hypertension, le sexe, le volume rénal et le DFG en analyse multivariée

BJN 60 - Fig 1

  • Une osmolarité urinaire initiale plus élevée est associée à un déclin plus lent de la fonction rénale
  • Le traitement par Tolvaptan entraine une réduction de l’osmolarité urinaire de 200-250 mOsm/kg sans perte d’effet en 36 mois
  • La réponse au Tolvaptan influencée par le DFG et l’osmolarité urinaire initiale
  • Une meilleure fonction rénale et une réduction plus importante de l’osmolarité urinaire sont associées à une diminution des événements cliniques
  • Une réduction plus importante de l’osmolarité urinaire est associée à un déclin de la fonction rénale plus lent à 3 ans
  • Le déclin de l’osmolarité urinaire durant le suivi dans les 2 groupes est le reflet de l’évolution de la PKRAD et/ou des apports hydriques

BJN 60 - Fig 2

Conclusion

  • Efficacité du Tolvaptan après 36 mois
  • Les facteurs associés à la réponse au traitement sont :
    – Une diminution importante de l’osmolarité urinaire
    – Un meilleur DFG
  • L’osmolarité urinaire est un marqueur pronostique non invasif et fiable pour le suivi de la PKRAD

Ce qui supporte le lien entre la signalisation vasopressine V2R et la progression de la maladie rénale dans la PKRAD.

 

Les plus du papier

– 1ère étude large évaluant l’osmolarité urinaire à la baseline et sous Tolvaptan dans la PKRAD
– Multicentrique et internationale
– Dosage de l’osmolarité urinaire centralisé
– Indicateurs fiables de progression de la maladie : DFG, IRM rénale

 

Les critiques

  • Les patients étaient encouragés à boire abondamment, ce qui peut sous-estimer l’effet du Tolvaptan : l’augmentation des apports hydriques pourrait ralentir la maladie
  • Les osmolarités urinaires intermédiaires n’étaient pas dosées à jeun : des variations pouvant être observées durant la journée

Merci à Mickaël Bobot (Interne de néphrologie à Marseille) pour cette synthèse bibliographique. Vous aussi, n’hésitez pas à nous envoyer vos lectures !

 

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