BJN#92 – Evérolimus en transplantation rénale : enfin une place pour un vieil ami ?
Everolimus with Reduced Calcineurin Inhibitor Exposure in Renal Transplantation
Merci à Yosu Luque, Néphrologue à Paris et membre du conseil scientifique du CJN, pour cette synthèse bibliographique. Vous aussi, n’hésitez pas à nous envoyer vos lectures !
Introduction
La place exacte des inhibiteurs de mTOR, comme l’évérolimus, dans la stratégie immunosuppressive en transplantation rénale n’est pas encore élucidée. En effet, ces molécules s’accompagnent, à forte dose, d’effets indésirables invalidants comme une protéinurie, un retard de cicatrisation, des cas de pneumopathie ou des oedèmes périphériques. Cependant, l’épargne en anticalcineurine grâce à leur utilisation et le potentiel effet anti-viral motivent la réalisation de nouvelles études cliniques pour établir la place de cette molécule en transplantation.
Cette étude multicentrique TRANSFORM vise à tester la non-infériorité d’une stratégie immunosuppressive d’entretien associant corticoïdes / anticalcineurines faible dose / évérolimus versus une immunosuppression classique corticoïdes / anticalcineurine à dose habituelle / mycophénolate mofétil chez des patients transplantés rénaux à risque immunologique faible ou intermédiaire. Le critère principal étudié est la survenue d’un critère composite associant rejet aigu prouvé histologiquement et DFG estimé par MDRD <50 ml/min à 1 an de la transplantation.
Patients/matériels et méthodes
Il s’agit d’une étude multicentrique (186 centres, 42 pays) prospective en ouvert de non infériorité (marge de non infériorité à 10%) et analysée en intention de traiter. Les patients inclus étaient à faible risque immunologique ou risque intermédiaire (PRA bas ou absence de DSA en fonction des centres).
Résultats
2037 patients transplantés rénaux ont été étudiés (évérolimus n=1022, MPA n=1015), le critère principal a été atteint dans 48,2% (493) des patients du groupe évérolimus et 45,1% (457) des patients du groupe MMF (différence 3,2%; intervalle de confiance à 95%, 21,3%-7,6%). On ne note pas de différence entre les groupes traités par tacrolimus ou ciclosporine pour l’incidence du critère principal. On ne note pas de différence dans l’incidence du critère secondaire suivant associant rejet aigu prouvé histologiquement traité et décès à un an de greffe (14,9% versus 12,5%). Pas de différence non plus retrouvée sur la détection de DSA de novo ou de rejet aigu humoral à un an entre les deux groupes. Les infections virales à cytomégalovirus (3,6% versus 13,3%) et BK virus (4,3% versus 8,0%) étaient moins fréquentes dans le groupe évérolimus que dans le groupe MMF. Cependant l’arrêt du traitement lié à un effet indésirable était noté dans 23,0% des patients du groupe évérolimus et 11,9% des patients du groupe MMF.
Conclusion
Chez les patients transplantés rénaux à risque immunologique faible ou modéré l’évérolimus associé à des faibles doses d’anticalcineurines n’était pas inférieur au MMF associé aux anticalcineurines en termes de survenue d’un rejet et de maintien de la fonction rénale à un an de greffe.
Les plus du papier
Etude multicentrique avec une grande population de transplantés rénaux
Critère principal incluant la fonction rénale à un an
Evaluation de bonne qualité d’une nouvelle association immunosuppressive pour les patients à faible risque immunologique avec épargne en anticalcineurine
Intérêt du suivi à 2 ans pour sur la survenue de rejets, DSA de novo et événements cardio-vasculaires
Les critiques
Hétérogénéité de certaines mesures comme DSA et PRA liés à la multiplicité des centres et des pays rendant difficile l’évaluation homogène du risque immunologique
Pas de bénéfice (attendu pourtant) sur la survenue du diabète ou sur le DFG à un an
Bénéfice anti-viral lié à l’évérolimus ou à l’épargne en anticalcineurine ?
23% d’arrêt de traitement avec évérolimus liés aux effets secondaires
L’association ciclosporine/évérolimus semble associée à une survenue accrue des rejets que l’association tacrolimus/évérolimus