BJN# 253: Régime HYPERPROTEINE ok ! But what about my kidney even if I’m not IRC?
Merci à Camélia Boukhris, de Reims, nouvelle membre du conseil scientifique du CJN pour ce résumé.
Cette BJN est rédigée en rapport avec cet article : «Effects of High-Protein Diet on Kidney Injury under Conditions of Non-CKD or CKD in Mice», publié par Shohei Tanaka et al dans Int J Mol Sci, en mai 2023.
Introduction
Considérant la prévalence de l’obésité dans le monde et l’âge croissant de la population, le suivi d’un régime hyperprotéiné (RHP) pourrait être avantageux.
Des apports protéiques adéquats ont des bénéfices bien connus permettant un maintien de la masse maigre et une réduction de la sarcopénie, notamment chez le sujet âgé. Ils ont un effet bénéfique sur l’homéostasie calcique et la densité minérale osseuse avec une réduction du risque de fractures. Ils permettent une perte de poids chez le sujet obèse, en augmentent la satiété, le contrôle glycémique et la sensibilité à l’insuline.
Cependant, ces RHP aggravent la dysfonction rénale chez les patients IRC. Ils entrainent une dilatation de l’artériole afférente qui conduit à une augmentation de la pression intra-glomérulaire menant elle-même à une hyperfiltration glomérulaire.
L’hyperfiltration à long terme entraine une glomerulosclérose, une hypoxie tubulo-interstitielle entrainant inflammation et fibrose interstitielle. A contrario, l’effet des RHP sur la fonction rénale des individus sains reste controversé.
Matériels et méthodes
Le but de cette étude est d’analyser l’effet d’un RHP sur le rein (modèle murin) dans des conditions d’«IRC» et de «non-IRC».
129 souris mâles ont été inclus dans cette étude.
Les souris ont été divisées en 4 groupes :
- Des souris ayant subi une chirurgie blanche (sham) et donc considérées comme «non – IRC » soumises à un régime normal (sham+ND) ou à un RHP (sham+HPD group) pendant 12 semaines.
- Des souris ayant subi une néphrectomie des 5/6 (Nx) considérées comme «IRC» soumises à un régime normal (Nx +ND) ou à un RHP (Nx +HPD group) pendant 12 semaines.
Le régime normal (ND) comportait 24 % d’apports protéiques et 59% d’apports en hydrate de carbone contre 45 % d’apports protéiques et 38 % d’apports en hydrate de carbone dans le RHP (HPD). La créatininémie, l’urée sanguine, l’albuminurie, et l’effet sur la tension artérielle systolique ont été analysés. Des analyses histologiques et moléculaires ont été réalisées.
Résultats
La pression systolique était significativement plus élevée dans le groupe Nx que dans le groupe Sham. Cependant, le RHP n’entrainait pas d’augmentation la pression systolique dans les deux groupes (Nx et sham).
Un RHP de 12 semaines entrainait une augmentation de la clairance de la créatinine seulement dans le groupe sham (non-IRC).
L’hypertrophie glomérulaire était retrouvée dans le groupe Nx et non retrouvée dans le groupe sham. Cependant, le RHP n’entrainait pas d’augmentation de l’hypertrophie glomérulaire dans les deux groupes.
Un RHP entraine une augmentation de l’excrétion urinaire d’albumine et aggrave l’atteinte podocytaire (diminution significative de DACH1) et glomérulaire dans le groupe Nx. Alors qu’un RHP n’entraine pas d’augmentation de l’excrétion urinaire d’albumine, de glomerulosclérose, de fibrose tubulo interstitielle ou d’atteinte podocytaire dans le groupe sham.
NGAL était significativement supérieur dans le groupe Nx comparativement au groupe sham. Cependant, le RHP n’entrainait pas d’augmentation de NGAL dans les deux groupes.
Conclusion
Les RHP entrainent peu ou pas d’atteinte rénale chez des souris «non-IRC», contrairement au souris «IRC» (ayant subi une néphrectomie des 5/6 ème) chez lesquelles ces régimes exacerbent l’atteinte glomérulaire. Les patients IRC devraient suivre un régime hypo protidique pour éviter l’aggravation de leur insuffisance rénale tandis que les individus sains pourraient probablement maintenir un régime hyperproteiné. Les RHP ont probablement des mécanismes d’atteintes rénales différents entre les sujets IRC ou les sujets non-IRC.
Les plus du papier
- Questions que l’on se pose fréquemment, sans avoir de réponse claire et qui se posera de plus en plus dans les années à venir vu l’effet de «mode» actuel des régimes hyper protéinés parfois très très hyperprotéinés.
- Article récent (2023)
- Modèle animal : « remnant mouse kidney model » habituellement utilisé dans la recherche néphrologique
- Analyse histologique et moléculaire
Les critiques
- Modèle animal, extrapolation à l’homme ?
- Peu d’informations sur le type de régime hyperprotéiné. Il est mentionné que c’était principalement des protéines animales sans plus d’informations.
- RHP de 12 semaines, peut-être trop court pour voir les effets à long terme sur la population saine.
- Conclusion de cet article que les patients sains pourraient maintenir un régime hyperprotéiné sans risque rénal à long terme reste je pense à confirmer, notamment selon le degrés d’apports protidiques (1.4 ; 1.6 vs 2 g/kg/j ?).